Les
Héros de Météor et leur Idéologie |
Dans plusieurs épisodes transparaît donc la croyance en les vertus du savoir. Il serait fastidieux d'énumérer les numéros qui reproduisent le même scénario: les terriens rencontrent un peuple qui vit au stade tribal, voire à l'âge de pierre, et leur première pensée est de lui dispenser les connaissances terriennes. Ainsi cette réflexion face aux Darous (n°20, janvier 55, planche 7):
Accepter les cours terriens sera d'ailleurs la meilleure preuve d'intelligence (planche 11):
On le voit, les Terriens ne doutent pas du bien-fondé de leur action. Action qui ne se fait pas sans préjugés. Certains peuples ne semblent pas dignes de recevoir le savoir terrien. Il faut que le peuple soit foncièrement pacifique, et aussi qu'il ait les aptitudes à assimiler les techniques nouvelles. Cela traduit la croyance en des qualités et des défauts innés chez tel ou tel peuple (pl.33):
On ne commentera pas. (note du webmestre: voir le commentaire ci-contre)
Une fois cependant, Spencer décidera de ne pas intervenir dans l'évolution de la civilisation locale. C'est dans le n°62 (juin 58) planche 33, où il déclare:
Mais la loi Universelle en question n'a trouvé que ce cas d'espèce à son application, et en juillet 60 (n°87, "Les profs des étoiles"), on apprend d'ailleurs que
Le trio accompagnera donc sur Hyrgona un couple d'éducateurs, et le récit expose en long et en large leur action bienfaisante. Avec, en contrepoint, la mise hors d'état de nuire de deux commerçants véreux, qui échangent des babioles, de la verroterie contre l'aluminor, métal très précieux. Précisons que la couverture de ce numéro est des plus plaisantes, puisqu'on y voit un astronaute enseigner aux Hyrgoniens la géographie... de la Terre ! Cette attitude caractéristique du pire colonialisme n'est pas sans rappeler le mode d'éducation prôné par le professeur Hillar, et qui était condamné, dans le n°67.
Le cœur que Spencer et ses compagnons mettent à seriner de planète en planète l'évangile du progrès terrien montre combien ils croient en leur mission. Et pourtant, où a mené le progrès, sur Terre ? A un rythme de vie effréné, semblable à celui de Futura, où Spencer déclarait ne pouvoir vivre. D'ailleurs, quand il est en congé sur Terre, le trio ne se sent pas chez lui. Spade le dit clairement (n° 131):
On touche ici à la contradiction essentielle des héros. Incapables de vivre dans une société asphyxiée par la technique, ils n'ont qu'une idée, une fois inactifs: être chargés d'une nouvelle mission qui les enverra bien loin dans l'espace. Où et c'est tout le drame ils iront répandre les fondements d'une société qu'eux-mêmes ne supportent plus. Ils sont les premières victimes de l'idéologie qu'ils véhiculent. Mais ils restent inconscients semble-t-il de l'illogisme fondamental de leur comportement.
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Météor 87 (juillet 1960)
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Ce
document est extrait de la thèse
ETUDE THEMATIQUE ET TYPOLOGIQUE
D'UNE BANDE DESSINEE DE SCIENCE-FICTION:
LES AVENTURES DE SPENCER, SPADE ET TEXAS DANS LE MAGAZINE
"METEOR"
par Alain
Dartevelle (Université Libre de Bruxelles - 1975)
et publié sur ce site avec sa permission.
note du Prof TNJ:
ces aventures ont toujours été publiées en noir et blanc; certaines vignettes ont été mises en couleur par moi-même pour rendre ces pages plus brillantes (et aussi parce que je trouvais cet exercice passionnant).